• De la longévité d'un prêt

    Pour illustrer la nature des liens qui ont pu exister entre Mme Boillot et la famille de Claudius Allias, je vais vous parler d'un acte notarié, signé le 21 novembre 1905 devant maître Charles Nony, notaire à Artonne. Ce document est intitulé "Transport-cession par Mad Boillot à Mr Allias Blaise Claudius". La page de garde figure ci-après.

    Transport-cession Boillot Allias

     

    Pour bien comprendre il faut faire un retour en arrière ou relire la page un-rentier-a-artonne au chapitre "Prêteur sur gages". Le 12/03/1849 Gilbert Boillot prête à son ami Victor Mollerat résidant à Pouilly-sur-Saône (Cote d'Or) la somme de 1000 Fr. Le 02/05/1878 cette somme se transforme en 3900 Fr comprenant les 1000 Fr précédents, le rachat d'une créance de 1400 Fr et un autre prêt de 1500 Fr, le tout accordé par G Boillot à Madame Eugénie Mollerat, veuve de Victor. Le 07/04/1886 nouveau prêt de 6000 Fr accordé par G Boillot à Mademoiselle Lucile Mollerat, sœur et héritière de la précédente. Cette héritière doit donc au total 9900 Fr à Gilbert Boillot, le tout avec un taux d'intérêt de 5% l'an.

    Il se trouve que cette demoiselle Lucile Mollerat est également décédée, et son héritier un certain Paul Bousquand, Tuilier habitant à Pouilly-sur-Saône (côte d'Or). De plus Anne Drouaillet a maintenant plus de 82 ans, elle a décidé de transférer la créance ci-dessus à Claudius Allias, qui accepte. Tel est l'objet de cet acte. Anne Drouaillet avait auparavant accepté verbalement de ramener le taux d'intérêt de 5 à 4%. Elle reconnait dans l'acte avoir reçu de Mr Blaise Claudius Allias cessionnaire [la somme de neuf mille neuf cents francs] dès avant ce jour, en espèces ayant cours comptées et délivrées hors la vue du notaire soussigné.

    Claudius Allias a-t-il vraiment payé 9900 Fr à Mme Boillot, ou n'était-ce qu'une façade, je ne sais, mais il est maintenant chargé d'une dette assez conséquente à recouvrer.

    Et cela va durer ... un certain temps.

    - o -

    Quatorze ans ont passé, la première guerre mondiale vient de cesser. Voici une lettre datée du 27 octobre 1919

    Pouilly-sur-Saône par Seurre - Côte d'Or

    J'ai bien tardé à vous écrire , mais comme je n'avais pas d'argent à vous envoyer c'est la cause. Je pense toujours à vous et le seul moyen pour pouvoir m'acquitter envers vous, c'est de vendre une partie de la propriété dont j'ai chargé une agence de Paris, qui est venue sur les lieux, et qui m'a bien promis de s'en occuper bien sérieusement. Ils ont toujours rien trouvé et dit d'avoir de la patience, car dans ce moment ci les usines ne vont pas trop bien le charbon étant si difficile à se procurer et le personnel aussi, ayez donc encore de la patience et bonté envers nous, puisque l'état accorde aux petits industriels, qui n'ont pas fait d'affaires pendant la guerre.
    Pour la reconnaissance que vous me demandez envoyez moi donc le modèle et la somme que vous me metterez car moi je nôse.
    Recevez cher Claudius pour vous et votre famille toute notre reconnaissance, moi et ma famille nos respects.
    Paul Bousquand

    Quelques mois plus tard le même homme envoie la lettre suivante ainsi qu'une reconnaissance de dette 

    Reconnaissance de dette

    Pouilly-sur-Saône ce 17 février 1920
    Cher Claudius,
    Je suis peiné en apprenant par votre lettre que vous avez été malade ainsi que votre femme. J'espère qu'avec les beaux temps vous allez être vite rétabli c'est notre plus grand désir.
    Je vous envoie une reconnaissance ainsi que vous me le demander.
    J'aurai voulu faire mieux, car au reçu de votre dernière lettre je me suis mis tout de suite en quête de trouver pour pouvoir vendre une partie de la propriété afin que je puisse vous envoyer une partie de la somme que je vous dois. Je me suis adressé à une maison qui s'occupe de cet article. Et jusqu'à présent vous savez combien il y a de personnes qui hésitent à faire quelque chose pour le moment, mais quand tout sera rétabli dans sa sphère nous aurons plus de chance je l'espère. Je vous remercie bien de vouloir m'attendre.
    Recevez cher Claudius, pour moi et les miens notre reconnaissance et nos amitiés à votre femme et à votre fille ainsi qu'à vous.
    Paul Bousquand

    - o -

    La lecture des deux lettres ci-dessus et un calcul rapide permettent de comprendre que la dette de 3000 francs objet de la reconnaissance précédente correspond aux intérêts dus pour la période 1913-19, visiblement non payés, du prêt initial de 9900 Fr. Et vous avez compris le fond du problème : le débiteur n'a pas un sou pour rembourser sa dette

    Et la fête continue puisque le 2 janvier 1921 nous avons une nouvelle lettre de Paul Bousquand :

    Cher Claudius,
    Nous venons toute la famille à l'occasion de la nouvelle année pour vous souhaiter santé, prospérité et vous donner de nos nouvelles qui sont assez bonnes pour le moment. Nous espérons qu'il en est de même pour vous.
    Nous vous remercions de bien vouloir toujours nous attendre un peu.
    Je pense bien à vous tous nous ne vous oublirons pas
    Recevez cher Claudius pour vous et votre famille toutes nos amitiés.
    Paul Marguerite et Clotilde Bousquand.

    Un an après, par lettre du 3 février 1922, c'est Maître Louis Chopard, notaire à Seurre (Côte-d'Or) qui écrit à Claudius Allias.

    Je vous prie de me faire savoir ce qui vous est dû en principal et intérêts par M. Paul Bousquand de Pouilly-sur-Saône.
    Je vous présente Monsieur, mes salutations empressées.

     Et le 6 février 1922 Paul Bousquand lui écrit.

    Mon cher Claudius,
    Soyez sans inquiétude vous recevrez d'ici quelques jours vos intérêts échus.
    Je vous espère en meilleure santé depuis votre dernière lettre du jour de l'an.
    Recevez, cher Claudius, tous mes remerciements à l'avance mes amitiés de tout deux ma femme ainsi que les baisers de Clotilde.
    Veuillez s'il vous plait présenter nos compliments et amitiés à votre dame.
    Votre ami
    Paul Bousquand

    Le 7 février 1922 les choses avancent un peu, comme l'indique la lettre ci-après :

    Mon cher Claudius,
    Je viens vous remercier d'avoir bien voulu m'attendre jusqu'à présent pour pouvoir vous payer vos intérêts de votre hypothèque et ceux de la reconnaissance de trois mille francs pour tout ces intérêts. Je vous envoie mille cent francs.
    Je n'oublierai jamais la bonté que vous avez eu pour moi.
    Je recommande la lettre pour être plus sûr qu'elle vous parvienne ; en attendant de recevoir de vos nouvelles.
    Recevez mon cher Claudius, pour vous et votre famille nos remerciements, nos amitiés de tous trois.
    Votre ami
    Paul Bousquand

    - o -

    L'année suivante Claudius Allias reçoit la lettre suivante, datée du 18/09/1923 :

    Pouilly s/s 18/09/1923
    Monsieur Allias Tourret

    Pour vos intérêts d'abord faut-il les envoyer à vous personnellement ou au notaire
    Veuillez donc bien m'écrire à ce sujet
    Recevez Monsieur mes salutations distinguées
    Jules Burdy 

    Le 27 du même mois Claudius reçoit une nouvelle lettre :

    Je suis l'acquéreur de la propriété où est Mr Bousquand et je continue comme par le passé je veux dire par là que je reprend la place de Mr Paul Bousquand. Je vous envoi tout d'abord vos intérêts comme vous me dites par mandat poste.
    Pour le capital vous avez pris inscription qui finit je crois en 1925.

    Vous seriez donc bien aimable de me donner un peu plus de détail sur votre dû. A vous lire dans un prochain courrier.
    Recevez Monsieur mes sincères salutations.
    Votre bien dévoué
    Jules Burdy

    Les affaires semblent s'embrouiller un peu. Ci-après une lettre de Jules Burdy du 21 avril 1923 :

    Moi qui croyais que tous vos intérêts arriérés vous avait été payé seulement je me suis douté un peu de ce qui s'était passé j'ai versé à Mr Bousquand quelques jours avant la vente 1500 Fr pour vous et sur les 1500 vous en avez reçu 1100. En plus de ça le jour de la vente je lui ai versé 3000 Fr, alors si vous avez rien toucher de tout sa s'est moi qui suis la dupe de tout.
    Je vous demanderé de bien vouloir m'attendre un peu je dois toucher 20000 (vingt mille) Fr sur une propriété que j'ai vendu l'année dernière donc vous avez rien à craindre. Et pour plus ample renseignement vous pouvez vous renseigner à mon notaire maître Chopard à Seurre.
    Recevez Monsieur Claudius
    et vous prie d'agréer mes sincères salutations.
    Jules Burdy

    Nouvelle lettre datée du 16 février 1924

    Monsieur Allias
    Je vous envoyes ci contre par mandat lettre la somme de deux mille fr.

    Recevez Monsieur Allias mes salutations distinguées.
    Jules Burdy

    Et voici la dernière lettre de la série, datée du 25/02/1925

    Pouilly sur Saône le 25 Février 1925
    Mon cher Claudius,

    Il y a bientôt trois ans le 16 Mars 1923 que me demandant de l'argent que je vous devais, voyant que je ne pouvais pas vous en envoyer sans vendre ma propriété, ce qui a été fait et vendu à Mr Jules Burdy de Pouilly sur Saône. Je désirerai savoir si vous avez été payé par lui, me l'ayant dit le 19 Août 1924 le jour de la mort de ma pauvre fille Clotilde agée de dix neuf ans.
    De la somme de neuf mille neuf cents et de trois mille francs d'une reconnaissance que vous aviez acceptée par une lettre dont j'ai toutes les sommes en détail demandé par vous dont je pense vous en avez le double.
    En même temps qu'à vous j'écris à Me Groslier notaire à Artonne.
    Veuillez donc mon cher Claudius avoir la bonté de vous entendre avec votre notaire pour me donner une réponse le plutôt possible.
    Revevez, mon cher Claudius pour vous et votre famille toutes nos amitiés.
    Paul et Marguerite Bousquand

    - o -

     Nous n'avons pas la réponse à cette dernière lettre, on peut supposer qu'à cette époque l'affaire était soldée ... Mais quand on se souvient que le dernier prêt datait de 1886, il aura fallu presque 40 ans pour en voir le terme !

     - o -

     

    Cliquez sur le lien pour la page suivante deces-d-anne-drouaillet-boillot

    « Mme Boillot, veuve et rentièreDécès d'Anne Drouaillet-Boillot »

  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :